Les témoignages d’OVNI

Les phénomènes OVNI ont le don de stimuler l’imagination et de faire naître les théories les plus intrigantes. Il est certain que l’on serait tous stupéfait à l’idée d’avoir des preuves solides d’un phénomène surnaturel ou d’origine extraterrestre. Cependant, si notre but est de rester lucide, il est souhaitable (pour tout le monde) d’apporter un cadre et de la méthode au sujet. Revoyons donc quelques bases pour affiner notre jugement ! En guise de mise en bouche, voici deux observations bien étranges, dont on reparlera plus loin dans l’article. Activez le son pour mieux apprécier…
(sources et réponses plus bas dans l’article, pour ne pas spoiler !)
O.V.N.I, Soucoupe volante et P.A.N
L’acronyme OVNI (UFO en anglais), bien souvent utilisé, présente son lot de problèmes, car les mots véhiculent certains préjugés malgré eux. Ainsi, OVNI, pour Objet Volant Non Identifié, contient au moins deux mots au sens assez restreint. Un objet est souvent perçu comme quelque chose de relativement petit, aux contours définis, qui est palpable et bien souvent, conçu. Cela exclu donc intuitivement des éléments tels que de la brume, un reflet ou de la foudre en boule. De la même manière, volant fait plus facilement penser à un oiseau ou à un engin conçu pour voler qu’à un phénomène météorologique/astronomique quelconque. [1]
Le terme « Soucoupe volante » (flying saucer) est donc bien sûr, encore pire, puisque l’on restreint également la forme. A l’origine, ce terme vient d’interviews de Kenneth Arnold, un aviateur américain qui le 24 juin 1947 dit observer 9 objets étranges au niveau du Mont Rainier (état de Washington). Il décrit alors la forme de chaque objet comme étant tantôt un demi-cercle à l’avant et un triangle à l’arrière, tantôt un boomerang ou un croissant. Il décrit également leur déplacement comme étant celui d’une soucoupe à la surface de l’eau. Mais comme le dit Kenneth Arnold lui-même dans un article de The Atlantic [2]:
« Ces objets flottaient plus ou moins comme s’ils étaient, oh, je dirais, des bateaux sur de l’eau très agitée ou de l’air très agité, et quand j’ai décrit comment ils volaient, j’ai dit qu’ils volaient comme si on prenait une soucoupe et qu’on la lançait sur l’eau. La plupart des journaux ont mal compris et mal cité cette information. Ils ont dit que j’avais dit qu’ils ressemblaient à des soucoupes ; j’ai dit qu’ils volaient comme des soucoupes. »
Bref, en plus d’être un terme très restreint, il provient d’une erreur, aux répercussions durables.

Recherche google image de « flying saucers » citée dans The Atlantic
Reste à trouver un meilleur terme/acronyme pour être assez large, nuancé et complet.
Ainsi le CNES (Centre national d’études spatiales) en France propose et utilise PAN : un Phénomène Aérospatial non Identifié. [3]
Le GEIPAN ?
Pour collecter et analyser les témoignages de PAN, plusieurs projets sont nés au cours des décennies. L’un des plus connus est le projet Blue Book, aux États-Unis, initié par l’US Air Force de 1952 à 1969.
De notre côté de l’Atlantique, c’est le projet GEIPAN (Groupe d’étude et d’informations sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés), en France, qui est le plus connu et qui s’en charge encore actuellement. Le projet fut créé par le CNES en 1977, bien qu’il ne s’appellera GEIPAN qu’en 2005.
Pour réaliser ces investigations, ses membres ont accès à différents contacts, outils ou ressources externes. Ils peuvent ainsi analyser la météorologie, les données de l’aviation ou de la gendarmerie nationale ou encore le déplacement de satellites ou la position des astres à un instant donné.
Sur le site du GEIPAN (https://www.cnes-geipan.fr/), on peut trouver de nombreux témoignages anonymisés. Ils sont également triés par catégories rendant compte du fruit des investigations :

On peut y voir que beaucoup ont trouvé des réponses bien que d’autres demeurent sans explication. D’après le GEIPAN, aucun témoignage n’a encore amené à une preuve d’une technologie extraterrestre, même s’ils restent toujours prudents quant à leurs conclusions [4].
Les témoignages
Dans une interview/podcast de 2016 de Xavier Passot (ancien responsable du GEIPAN) et de Arnaud Esquerre (directeur de recherche CNRS), sur le site de France Inter [5], on en apprend un peu plus sur les témoignages collectés par le GEIPAN.
Ainsi, les témoignages obéissent généralement à une structure commune : La chronologie dans les évènements énoncés, l’envie de retenir l’attention de l’auditeur, de se focaliser sur l’évènement le plus extraordinaire, la tendance à négliger certains détails, le fait de vouloir décrire les formes, lumières et couleurs, l’envie de rester crédible. Tout ceci est à la fois utile et important, et à la fois peut altérer la neutralité du récit ou occulter des éléments essentiels. Le GEIPAN a donc entre autres pour mission de déterminer ce qui, dans un récit, est certain et ce qui est moins certain. Ensuite vient la comparaison avec une liste de méprises classiques :
- Le trafic aérien, qui peut parfois être surprenant (avions avec des feux colorés, escadrilles, etc). Le GEIPAN s’aide par exemple de cet outil https://www.flightradar24.com/
- Des satellites, la station spatiale internationale, des ballons sondes ou encore des rentrées atmosphériques, avec plusieurs outils comme https://www.space-track.org/.
- Des astres connus comme Vénus ou Mars, sont des méprises classiques : Vénus, parfois visible assez bas sur la voute céleste, peut apparaître grosse et lumineuse. On peut également avoir l’impression qu’elle bouge ou qu’elle nous suit. Cela est dû à différents effets réels (rotation de la terre etc) ou des illusions optiques (effet autocinétique et effet de parallaxe). Un bon outil pour les trouver à partir d’une position de la terre donnée est http://stellarium.org/ !
- Les lanternes chinoises/thaïlandaises/célestes, aussi parmi les méprises les plus communes. Ces petits ballons d’air chaud, contenant une bougie, sont souvent intrigants de par leurs envols en groupes et leurs déplacements au gré des vents.

- Des drones, des jeux de lumières, des reflets dans des vitres, des insectes tout près de l’objectif, des phénomènes météorologiques et bien d’autres choses !
Le site « Méprises du ciel » référence à peu près tous les évènements qu’il est possible d’observer https://meprises-du-ciel.fr/. Il mentionne notamment des phénomènes naturels plus rares aux noms étranges, comme les trous de Virga, les Feux de Saint-Elme ou encore les piliers de lumière !

Piliers de lumière / colonnes lumineuses, provoqués par la réflexion de la lumière des villes ou des astres sur des cristaux de glace dans l’air. source: https://meprises-du-ciel.fr/sources-naturelles/effets-doptiques/piliers-de-lumiere/
Il est bien certain que lorsque l’on voit quelque chose d’étonnant dans le ciel, et avant de sauter aux conclusions, il faudrait passer en revue tout ce que l’on connait déjà !
Alors, vous avez trouvé ?
Revenons aux deux témoignages vidéo du début de l’article. Avec les informations fournies plus haut, pensez-vous avoir compris de quoi il s’agissait ? Voici les réponses !
Cas 1 : Cas anonymisé et rendu public venant du site du GEIPAN https://www.cnes-geipan.fr/fr/cas/2009-01-02741
L’observation s’est produite à Istres le 25/01/2009. Si la boule lumineuse intrigue fortement les témoins le premier soir, le phénomène se reproduit les soirs suivants, et le doute se dissipe peu à peu. La conclusion du PV de la gendarmerie et du GEIPAN est claire : il s’agit de Vénus ! Les mouvements apparents et le halo bleu proviennent entre autres des zooms incessants de la caméra.
Cas 2 : Cas anonymisé et rendu public venant du site du GEIPAN https://www.cnes-geipan.fr/fr/cas/2023-02-51418
L’observation s’est produite à Pleyber-Christ le 10/02/2023. Le témoin voit différents objets lumineux orangés qui se déplacent lentement. Vous l’aurez compris, il s’agissait d’un lâcher de lanternes chinoises !
Pas mal non ? De nombreux autres témoignages se trouvent sur le site du GEIPAN à disposition du public et ne demandent qu’à être découverts. 🙂
Le mot de la fin
Les distances au sein de l’univers sont colossales. Hormis le soleil, l’étoile la plus proche est Proxima Centauri à 4.2 années-lumière de nous. Donc, à la vitesse inatteignable de la lumière, il faudrait 4.2 années pour la rejoindre. Pour traverser notre galaxie de part en part, c’est 100 000 ans qu’il nous faudrait à cette vitesse. Il m’apparait raisonnable, en voyant ces espaces vertigineux, d’être prudent lorsque l’on observe un phénomène étonnant dans le ciel. Aussi fascinant soit ce PAN, il reste très peu probable que ce soit des visiteurs venus d’ailleurs, mais bien plus que ce soit l’une des innombrables méprises du ciel. Á minima est-il judicieux de les prendre en compte dans notre calcul. Pour le reste, rien ne nous empêche de rêver et de regarder les cieux.
Qui sait ce que l’avenir nous réserve ?
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[1] Pastille de Mendax: https://www.youtube.com/watch?v=dUvcwG_H4U4
[2] https://www.theatlantic.com/technology/archive/2014/06/the-man-who-introduced-the-world-to-flying-saucers/372732/
http://www.debunker.com/texts/SaucerError.html
https://fr.wikipedia.org/wiki/Kenneth_Arnold
[3] https://www.cnes-geipan.fr/fr/glossaire
[4] https://www.cnes-geipan.fr/fr/node/58787
[5] https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-tete-au-carre/des-evenements-extraterrestres-sur-terre-6608186
Autre source: Defakator https://www.youtube.com/watch?v=XYKs5HxhHRQ
2 réflexions sur « Les témoignages d’OVNI »
C’est vraiment très intéressant, c’est un sujet qui fait partie de l’imaginaire collectif depuis très très longtemps. J’apprécie tes sources et ta documentation qui donne la fiabilité au propos. C’est toujours fouillé et précis ! en évitant d’être barbant ou rébarbatif grâce au différentes animations, images qui illustre l’article.
Mais le plus, est qu’il n’y a jamais de prise de position (même cachée) position, la neutralité du regard scientifique est gage de qualité de l’article et c’est toujours cette quête de la vérité qui est la ligne conductrice…top !!!
Vivement le suivant !
Merci beaucoup 🙂